
28 janvier L’usage de CCM maïs grain humide en élevage porcin
Le maïs grain occupe quelque 50.000 hectares en Belgique mais cette superficie varie considérablement d’année en année. Dans certaines exploitations, cette culture sert à ‘compléter’ le plan d’assolement. C’est souvent le cas lorsque le semis des céréales d’hiver s’est déroulé dans de mauvaises conditions ou lorsqu’il faut diminuer la production de légumes ou de pommes de terre.
Les surfaces en maïs grain destinées à la production de CCM ‘maïs grain humide’ sont beaucoup plus stables. Surtout en élevage porcin, bon nombre d’éleveurs optent consciemment pour l’inclusion de CCM dans la ration des porcs. Ce sont principalement des exploitations très professionnelles bien équipées pour l’affourragement de maïs grain en tant que produit de base.
Afin de mettre en avant la situation des éleveurs de porcs parmi les maïsiculteurs, notre rédaction a contacté le professeur Dirk Fremaut et le dr. Jeroen Degroote sur l’usage de CCM maïs grain humide en élevage porcin. Ces deux experts en élevage porcin bien connus parmi les éleveurs de porcs sont liés à la faculté de bio-ingénierie de l’université de Gand.
Quels sont les grands avantages de l’incorporation de CCM dans la ration ?
Le CCM maïs grain humide est une excellente source d’amidon dans la ration des porcs. Il contient en outre 3,5 % d’acide lactique, ce qui est favorable à la santé gastro-intestinale des porcs. De plus, grâce à son appétence, l’ingestion d’aliments se voit augmenter, stimulant à son tour la croissance et la conversion des aliments.
Il est toutefois également possible de rajouter de l’acide lactique aux concentrés commerciaux, mais cela représente évidemment un coût. En effet, l’affourragement de CCM permet justement de faire des économies. C’est un avantage majeur qu’il convient de garder à l’esprit. En effet, la question qu’il faut toujours se poser est de savoir à quel coût le CCM peut être incorporé dans la ration.
Le CCM, est-il un aliment approprié à tous les porcs ? Quelle est la proportion optimale dans la ration ?
Le CCM peut autant être distribué aux truies et aux porcelets qu’aux porcs charcutiers, et ce à tous les stades de croissance de l’animal. En pratique, la ration des porcelets contient en général maximum 20% de CCM tandis que celle des animaux plus âgés peut atteindre 25 à 30%. Cette proportion permet de diversifier suffisamment le choix des produits de base et d’offrir aux animaux une ration équilibrée sans compromettre la santé du porc.
Lorsque le CCM est exempt de mycotoxines et qu’il possède une faible teneur en fibres brutes, la part du CCM peut même être augmentée encore.

Les mycotoxines, constituent-elles un danger réel ? L’éleveur de porcs, comment doit-il faire face à cela ?
Les porcs sont très sensibles aux mycotoxines DON et ZEA que l’on peut retrouver dans le CCM. Les DON sont surtout préjudiciables à l’ingestion des aliments tandis que les ZEA font diminuer la fertilité des animaux. Il faut toutefois également tenir compte du fait que les porcelets sont encore plus sensibles que les animaux plus âgés.
Nous conseillons de faire analyser le maïs sur la présence de mycotoxines.
En effet, en distribuant du maïs grain sous forme humide, c’est l’agriculteur qui prend le risque. Au cas où les teneurs en mycotoxines DON ou ZEA du silo dépasseraient la norme, il est conseillé de diminuer la proportion du CCM dans la ration et de ne plus en distribuer aux porcelets, ni par ailleurs aux truies afin de prévenir des problèmes de fertilité.
On suppose souvent que la valeur alimentaire du CCM est assez stable, mais est-ce que cela a été confirmé ?
Ce n’est pas du tout le cas. La teneur en amidon du CCM peut varier fortement sous l’influence de l’année et de la variété. Le différentiel entre l’ensilage à haute teneur et celui à faible teneur en amidon peut atteindre 10% dans bon nombre de cas. La part des rafles et la finesse des particules influencent également la valeur alimentaire.
La règle d’or dans ce cas, c’est également ‘analyser, c’est savoir’. Une analyse de la valeur alimentaire est indispensable pour le calcul de la ration.
Quelle est l’influence de la part de la rafle sur la valeur alimentaire du CCM ?
On retrouve peu d’arguments qui plaident en faveur de la récolte de l’épi avec la rafle. En récoltant l’épi avec la rafle, la teneur en fibres brutes du CCM augmentera, mais en pratique, d’autres sources de fibre sont à privilégier. En effet, la fraction fibreuse de la rafle contient beaucoup de lignine. Cela veut dire que ces fibres fermentent mal et qu’elles sont peu solubles. Le pouvoir d’absorption d’eau de la rafle est la moitié de celui de la pulpe sur-pressée. De plus, la teneur en amidon du CCM diminue au fur et à mesure que la part des rafles s’accroît et pour finir, la rafle est souvent une source de mycotoxines. A contrario, l’augmentation (limitée) du rendement en grains constitue un argument en faveur de la récolte avec 10% de rafles. En effet, le bon réglage de la moissonneuse-batteuse permet de récolter également les petites graines au sommet de l’épi qui se perdraient autrement. Le rendement récolté se verra ainsi augmenter d’environ 200 kg de graines à l’hectare.
Quelle est la taille optimale des particules en CCM afin de les utiliser de façon optimale ? Comment peut-on contrôler cela en pratique ?
La finesse de hachage en CCM est très importante et souvent sous-estimée. En effet, la digestibilité de ce produit peut varier de 6 à 7% en fonction de la finesse du hachage. La puissance du broyeur à marteaux doit donc être importante afin de pouvoir broyer finement les particules. C’est le broyeur qui doit dicter le débit du chantier, pas la moissonneuse-batteuse.
Tout d’abord, il faut savoir que maximum 20% des particules en CCM peuvent dépasser les 2 mm. Il faudra toutefois tenir compte du fait que la taille des particules ne sera pas tout de suite optimale. La taille correcte sera déterminée à l’aide d’un tamis en examinant la taille des particules retenues par les tamis de différentes tailles. La moyenne géométrique doit être inférieure à 800 ou même à 600 microns. En augmentant de 100 microns la finesse du fourrage, le solde fourrager par porc se voit augmenter de 0,5 euro. Pour le contrôle de la taille des particules, un simple jeu de tamis peut déjà faire des miracles. Certes, les calculs sont un peu plus compliqués, mais il existe des feuilles de calcul à cet effet.
En résumé, quels sont les principaux points d’attention pour l’incorporation de CCM dans la ration ?
Comme il fut déjà mentionné, il faut toujours bien contrôler la finesse des particules et la part de la rafle pendant la récolte. A côté de cela, nous ne pouvons accentuer assez l’importance d’une analyse afin de savoir s’il y a des mycotoxines et afin de connaître la valeur alimentaire. Une bonne connaissance du produit avec lequel on travaille se trouve à la base d’une incorporation bien réfléchie du CCM dans la ration.